15 janvier 2011

Deuxième Route 1985 : la Bretagne

Puisqu'un an auparavant je regardais les multicoques s'élancer dans la première transat entre Québec et Saint Malo, ça m'a paru évident d'aller visiter la cité fortifiée des corsaires et ce fabuleux territoire qui mêle son socle granitique ancien à l'océan atlantique... En outre, c'est en Bretagne que j'ai mes premiers souvenirs de vacances, à un âge où je couchais encore dans un hamac par dessus les sièges avant du Combi Volkswagen de mes parents (comme ceux des hippies, les fleurs peintes et d'autres choses en moins !)... Bref, comme le cousin Blaise, en Breizh (Bretagne), je m'y sens à l'aise !
Bretagne du sud, avec la lumière quasi-méditerranéenne du Morbihan, les alignements de menhirs de Carnac, Bretagne du nord avec les empilements de rochers de granit rose de Ploumanach', les abers encaissés et sa côte déchiquetée qui change au gré des marées, notamment autour de l'île de Bréhat, Bretagne du centre où les elfes et farfadets courent dans la profonde forêt de Brocéliande mais les calvaires ouvragés protègent les villages aux toits d'ardoise, Bretagne de l'ouest où l'océan affronte la terre dans des combats homériques autour de la Pointe du Raz, des Tas de Pois, de la Pointe Saint Mathieu ou de l'île vierge...
C'est aussi le domaine des phares, funambules immobiles érigés au prix de mille sacrifices afin de baliser ces eaux qui ont englouti tant de drames, ici l'océan trempe aussi les âmes...
Bon, en été, les vagues rafraichissent les baigneurs peu frileux, au moins l'eau n'est pas troublée par les huiles de bronzage dont se tartinent les crêpes qui s'entassent sur les plages bondées de la côte d'Azur... Moi, les crêpes, je les préfèrent dans mon assiette, en dessert après quelques galettes arrosées de bolées de cidre brut fermier...
Mais les gens vivent aussi de la mer, ça serait péché que de ne pas se régaler d'un Bar grillé, des huitres de Belon, d'un plateau de fruits de mer... Tout autant que d'artichauts, de patates et autres légumes dont le climat océanique favorise la culture (je laisse de côté les élevages industriels de porcs et de poulets...). J'en profite pour faire un amical coucou à la Famille Champagne, amis de longue date de mes parents et que je ne manque pas de saluer quand je passe dans les Côtes d'Armor, kenavo pour votre accueil, tout comme la famille de mon pote Apap, « tellement contente de nous revoir » même si c'était la première fois !...
Un jour, je croise l'un des derniers goémoniers qui récolte le varech sur la plage avec sa carriole tractée par deux splendides percherons, je doute que cela existe encore... Aussi rare, la belle maison blanche au toit d'ardoises noires et aux volets de couleur vive, rouge, verte, jaune ou bleue, peu importe, pourvu qu'elle soit pittoresque... Il y en a !
En quittant cette contrée, je n'en oublie pas moins de visiter l'un des plus beaux exemples d'architecture médiévale sacrée, le normand Mont Saint Michel, une pure merveille dans un site naturel exceptionnel. La marée n'y monte pas à la vitesse d'un cheval au galop comme l'assure la rumeur, mais elle a tôt fait d'isoler les imprudents qui ont voulu jouer aux moutons des prés salés...
Bon, malgré tout, il faut quand même continuer à affirmer qu'en Bretagne il pleut tout le temps, ça permet de limiter le nombre de candidats à l'invasion dévastatrice des touristes, comme en plus il ne pleut que sur les c..., ça les calme... Et puis, comme le dit le druide Stanislas qui le tient de son père, un certain Merlin : « Krawa rer ne che maro » (je ne garantis pas l'orthographe, mais « Qui se gratte le derrière n'est pas mort » !)... Passe moi le celte !
Devezh mat (bonne journée) !

Première Route 1985 : Venise

Je profite des vacances de Pascal pour faire une escapade dans l'archipel citadin de la cité des doges... C'est en train que je traverse l'Italie, via Torino (Turin), Milano (Milan) et plusieurs fois Binario... Ce n'est qu'après mon retour qu'on m'apprendra que « binario » signifie « quai » !
Le train traverse la lagune pour terminer sa course au bord du Grand Canal, l'artère principale de la ville, c'est pratique comme repère !
Parce que Venise, c'est un labyrinthe piétonnier, avec ses incontournables comme le Pont du Rialto, la Place Saint-Marc, où se concentrent les touristes de tous les pays, mais la ville dévoile son vrai caractère au détour des ruelles encadrées entre de longs murs de brique, des placettes où trônent des églises blanches, de ses ponts-escaliers sur lesquels s'arc-boutent les livreurs avec leurs diables, de l'eau parfois glauque de ses innombrables canaux...
Il faut vouloir s'y perdre pour apercevoir furtivement de somptueux jardins par l'entrebâillement d'une lourde porte, une barge-épicerie ambulante qui croise une gondole-corbillard, un chat qui surveille son territoire depuis un balcon en fer forgé, les yeux mi-clos (Venise est un royaume pour les chats...), ou le vaisseau d'apparat du Doge dans un hangar de l'Arsenal...
J'avais réussi à trouver un hôtel pas trop cher, mais l'entrée était dissimulée dans un « sotoportego », un « porche » et le premier soir, j'ai mis plus d'une heure à la retrouver, alors que j'étais bien fatigué de ma journée de crapahutage, la porte noire disparaissait totalement dans l'obscurité de la nuit...
J'ai dû passer plusieurs fois devant, alors que les rares passants nocturnes m'indiquaient à chaque fois la même direction, c'était juste pas possible ! Dès le lendemain, j'ai fait comme bon nombre de routards et de vagabonds, je suis allé coucher sur les bancs de la gare, au moins c'était facile à rejoindre et la police nous laissait y dormir jusqu'au lever du soleil...
Comme ça, j'ai pu visiter tous les endroits les plus touristiques avant l'arrivée massive des visiteurs d'un jour, profiter des ambiances délicates de la brume du petit matin qui étire ses écharpes duveteuses le long des voies d'eau, et déguster mon café du matin en paix... A ce propos, en Italie on boit du bon café, sans nul doute, mais c'est l'eau qui doit être rare et hors de prix, tellement il y en a peu dans la tasse ! Déjà qu'une tasse d'expresso, ce n'est pas bien grand, c'est à peine si elle est remplie à moitié !
A Venise, on cultive tellement le goût du secret que même les ingrédients de la pizza se cachent à l'intérieur, dans une « calzone » ! C'est sous cette forme qu'elle a nourri des générations de travailleurs modestes avant d'être vendue à prix d'or aux passants qui passent, parce que si on y réfléchit bien, on paye 10 voire 15 euros (un sacré paquet de lires à cette époque !) pour une pâte à pain avec de la purée de tomates, des lamelles de champignon, quelques morceaux de jambon, une olive noire et du fromage fondu ? Basta !
En une semaine, on peut trouver le temps de sortir de la ville et se balader dans les iles avoisinantes, l'île-cimetière de San Michele, l'île des souffleurs de verre de Murano, l'île des dentellières de Burano, avec son clocher qui penche par dessus les maisons colorées... Je laisse les gondoles aller à Venise, entre les marques du chenal, leur coque asymétrique permettant au gondolier de chanter et surtout de ne ramer que d'un seul côté pour avancer droit...

Je profite de mon séjour dans la Sérénissime pour visiter une expo formidable, 40 chefs d'œuvre de peinture impressionniste sortis temporairement des salles des musées soviétiques, derrière le rideau de fer, une vraie révélation, je ne reverrais certains de ces tableaux que dans les musées russes de Moscou et Saint Petersbourg, 24 ans plus tard...

Pour finir, l' «arrivée d'air scie' », le « père y colle au zoo ce porc Jerzy'' », ceux qui connaissent les dingo-dossiers écrits par Goscinny et dessinés par Gotlib apprécieront, les autres, comment, vous ne les avez pas encore lus ? Ne passez pas à côté du bonheur ! (Donc, 'au revoir et ''il est dangereux de se pencher au dehors, je traduis pour ceux qui n'ont pas la botte secrète italienne...)