12 juin 2021

Road-trip marocain

Road-trip marocain, février2020



C'était il y a très longtemps, dans une galaxie lointaine...

Heu, ben non, en fait, en février dernier, j'ai répondu à l'invitation d'un ami-de-presque-quarante-ans, Omar, et je me suis envolé pour Marrakech, au Maroc, à trois heures de Lyon...



Les avions vus des jardins de la Ménara, à Marrakech.

Je perds 15° en latitude mais je les rattrape en température, et ça, comme les rayons du soleil d'hiver, c'est bon pour le moral !


Pour le bien-être du muscle du milieu, la maîtresse de maison me régale de soupes bien roboratives, de succulents tajines et de couscous raffinés, de pâtisseries un tantinet énergétiques et de crêpes parfumées à l'huile d'argan...
Avec les superbes citrons du jardin, c'est aussi l'heure des premières fraises !


Je profite des relations de mon ami pour me faire refaire chez un tailleur des pantalons sur mesure, dans de beaux tissus, sur un modèle acheté en Iran il y a douze ans dans un bazar de la route de la soie...


Vingt ans après mon dernier passage dans la quasi-millénaire ville ocre, les remparts se sont refait une beauté mais ne suffisent pas à contenir le tourisme de masse, je renonce à visiter le jardin Majorelle devant l'affluence des touristes et pars me perdre dans le dédale des ruelles du souk de l'antique médina...

Si je devais me loger dans la vieille ville, je tâcherais vraiment de savoir si l'adresse est facile à trouver et retrouver, dans ce labyrinthe enchevêtré aux innombrables impasses tortueuses (et sans pancartes!)...

Heureusement, j'ai un bon sens d'orientation !

Les boutiques hétéroclites du souk de la Médina.

Bon, je ne veux pas abuser de l'hospitalité de mes hôtes, et je ressens l'appel irrépressible du Sud...


Pour cela, je dois franchir la barrière montagneuse du Haut Atlas qui se dresse à une trentaine de kilomètres de Marrakech dont les sommets (à plus de 4000 m) portent un chapeau enneigé...


Or, les deux principaux cols routiers à proximité sont tous à plus de 2100m d'altitude, mais comme je ne veux pas faire le détour par la côte via l'autoroute, je vais tenter ma chance !
Direction sud-ouest via le Tizi n'Test (2100m) par une superbe route de montagne, qui dévoile de majestueux points de vue à chaque virage...

Pas de neige, peu de circulation, heureusement parce que la route est étroite et la descente de la face sud sur la plaine de Taroudant est particulièrement abrupte !


C'est dans la ville fortifiée de Taroudant que je trouverais babouche à mon pied, en cuir rouge, confortable et légère...

Mon hôte m'y fera visiter le grand marché hebdomadaire et, à ma demande, m'amènera chez son marchand d'huile d'argan artisanale (j'en achète 2 litres), J'adore le petit goût de noisette de cette huile aux reflets d'or !



Je me dirige maintenant vers le Moyen Atlas et la ville aux rochers colorés de Tafraoute, avec au passage quelques dromadaires friands des noix d'arganiers, comme les chèvres qui grimpent dans ces arbres, et des ksars qui attestent d'un passé agité, quand il fallait se protéger des razzias des tribus nomades du désert proche...


Tafraoute est au cœur d'un univers minéral magnifique, quelques rochers de Ploumanach' sont venus en villégiature dans les environs et un artiste hollandais s'en est servi pour en faire une œuvre de Land Art aux couleurs vives (voir photo dans un message précédent)...
Village fortifié.

Le véritable artiste de la région reste toutefois la Nature, qui expose son œuvre à ciel ouvert dans ces montagnes creusées de canyons aux falaises escarpées, aux formes torturées par les forces telluriques, un paradis pour géologues !

Dans cet environnement brut, le gel nocturne affronte la fournaise du jour et les oueds font jaillir des oasis exubérantes au fond des vallées où les villages se confondent avec les roches alentours...
Vallée du Moyen-Atlas.
Bon, même si le goudron progresse partout au Maroc, pour ressortir de la vallée c'est une piste rocailleuse où surnagent quelques pâles réminiscences d'un ancien revêtement, qui mettent à mal les pneus déjà bien fatigués de ma voiture de location (un point que j'ai oublié de vérifier en profondeur au départ)...


Je dois changer un pneu le lendemain, heureusement que je suis au Maroc, je m'en sors pour 30 € (que l'assurance supplémentaire aurait dû couvrir, mais bien sûr c'est encore une arnaque!) et je continue ma route, plein est, en direction du roi des déserts, j'ai nommé le Sahara...


C'est là qu'on se rend compte que le Maroc est un grand pays et qu'il faut bien quelques panneaux de : « attention ! traversée de dromadaires » pour égayer une certaine monotonie dans les paysages tout au long de ces 1000 kms...


Parfois, une brèche dans le relief laisse apercevoir une vallée cachée...
Une apparition dûe au génie de la route qui aurait frotté sa lampe au passage de mon tapis magique !
On croit d'abord à un mirage, mais non, ça mérite bien un virage !


Vallée magique,

Parvenu dans la vallée du Draa, à mi-parcours de ce marathon vers le sable, c'est à la dune de Tindouf que je foule aux pieds (et aux pneus) ces majestueux tas de poussière minérale...

De là, il ne restait que 38 jours de dromadaire pour rejoindre Tombouctou, plein sud, mais aujourd'hui c'est une zone de guerre...

La dune de Tindouf.


Je retourne sur le goudron pour rejoindre l'erg Chebbi, à un jour de voiture vers l'est, vers Merzouga...

Il y a vingt ans, il n'y avait qu'une maison au pied des gigantesques dunes mordorées, au bout de la piste qui suivait les poteaux de la ligne électrique, et le téléphone mobile ne se captait qu'au bout d'une perche de 3 mètres sur le toit de l'auberge !

Aujourd'hui, le goudron arrive au pied des dunes où se pressent quelques 400 hôtels, tous avec le wifi...

Pour le petit parfum de l'aventure, il faut donc aller plus loin, pas trop parce que ma voiture n'est pas un 4x4 et mes compétence de berbère plastique ne m'empêcheront pas de m'ensabler...

Mais l'honneur des hommes du désert est toujours d'actualité et je suis immédiatement (et gracieusement) dépanné par un touareg en mobylette qui passait par là... La tradition est respectée !

Je poursuis donc mon envie de sable chaud dans ce que j'appelle le « désert brûlé », vu la couleur caractéristique des dunes...

Le désert brûlé au sud de Merzouga.


Ici, le silence environnant permet presque d'entendre l'écoulement des grains de sable poussés par le vent... Les dunes sont les vagues de la gigantesque mer de sable qui ondule à perte de vue...


Pourtant, les chotts (lacs salés asséchés) ainsi que les nombreux fossiles, que l'on trouve à foison ici, témoignent de la présence de l'eau en abondance il y a mille et une nuits...


Le Sahara, roi des déserts, continue d'avancer, imperturbablement, alors que dans le même temps les glaciers reculent, c'est le yin et le yang de la respiration planétaire !


Il n'est pas rare que le vent du sud, qui se charge d'humidité au dessus de la Méditerranée, se déleste d'une pluie jaunâtre dans tout le sillon rhodanien, ça assure du travail pour les laveurs de carreaux et les marchands d'essuie-glaces !


Certains de ces petits grains de sable iront jusqu'aux dunes de Maspalomas aux Canaries, et, portés par les alizés, atterriront même en Amazonie, par delà l'océan Atlantique, un voyage de plusieurs milliers de kilomètres ! Sacrée plage !



Après la mer, la montagne, il est temps de revenir dans le Haut Atlas...


Je reprends donc la route, peut-être avec un peu d'entrain puisqu'une jolie brunette me gratifie d'un petit mot doux à 15€...

Je rejoins les gorges du Todra, et même si l'urbanisation galopante gâche les premiers kilomètres, au point de masquer entièrement l'oued, une fois passé le défilé les touristes s'évaporent, laissant la place aux chèvres gardées par les enfants, aux femmes qui marchent courbées sous de lourds fardeaux pendant que les hommes se déplacent à dos d'âne...

Je tente alors d'emprunter une piste qui me faisait rêver depuis mon premier passage dans la région il y a 33 ans, qui permet de relier la vallée du Todra à celle du Dadès, passant par le Tizi n'Wato à 2800 m...



En piste vers le Tizi n'Wato...

Réchauffement climatique oblige, même à cette altitude la neige est rare, et il vaut mieux ne pas s'engager sur la piste par temps de pluie (de plus en plus rare, aussi) parce qu'on progresse souvent dans le lit (très) caillouteux des oueds...

« Qui va lentement, va loin », vieux proverbe berbère, il me faudra bien 4 heures pour parcourir la trentaine de kilomètres de caillasse dans un paysage grandiose alternant entre passages encaissés et perspectives infinies, pour le plaisir des yeux en espérant que les pneus tiennent, et que le moteur ne chauffe pas trop !
C'est avec un soulagement certain et le sentiment du devoir accompli que je rejoins le goudron dans la haute vallée du Dadès à la tombée de la nuit, la première auberge est la bonne !

Le lendemain, pour le plaisir, je rejoins le Tizi n'Wano à 3200 m, en plein mois de février, la piste à flanc de montagne est ouverte, c'est dingue ! Je domine même les sommets environnants couverts de neige... Il ne faut pas regarder en bas si on a le vertige !

Je reviens vers la splendide vallée du Dadès, avec ses vergers d'altitude, ses canyons grandioses et ses gorges ciselées au scalpel, pour déboucher sur les roches en « doigts de singe » selon le nom localement mondialisé...



Les rochers du Dadès.

Après une brève incursion dans la vallée des roses, mais ce n'est pas la saison de la floraison (en mai) et le jour baisse déjà, je rejoins Ouarzazate (et mourir...).

La grande route, au trafic dense (j'en avais perdu l'habitude!) passe de ksar en ksar disséminés dans une palmeraie avec la chaîne de l'Atlas en toile de fond...

Peu avant de rejoindre le Hollywood marocain, je suis attiré par la lumière d'un puissant phare : il s'agit en fait de la plus grande centrale solaire d'Afrique !




La centrale solaire Noor (580 Méga Watts).
C'est jour de repos aujourd'hui, au programme : un lavage approfondi pour la voiture et une visite nécessaire chez un barbier berbère pour moi !

Le reste de la journée se partage entre un peu de lecture, quelques thés à la menthe et l'observation de ce qu'il se passe dans la rue, partout dans le monde c'est une occupation à plein temps ! Ce soir, c'est couscous...

Le ksar d'Aït Ben Haddou.
Retour sur Marrakech aujourd'hui, via la forteresse d'Aït Ben Haddou, assez tôt le matin pour éviter la foule qui s'agglutine dans tous les endroits classés au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco...

Une route goudronnée rejoint le Tizi n'Tichka à 2260m, sur l'axe principal reliant Ouarzazate à Marrakech, en passant par une magnifique vallée. Elle remplace une piste dantesque qui m'avait pris 7 heures en Fiat Panda (normale, pas 4x4 !) il y a 20 ans (les anglais en Land Rover rencontrés ce jour n'ont jamais voulu croire que j'étais passé par là !)...

De retour chez mon ami-de-presque-quarante-ans, ce dernier m'accompagne pour une visite inédite de ce qu'il reste de la grande palmeraie, puis un tour des environs de la ville ocre (ses terrains vagues, ses chantiers, ses décharges, ses embouteillages...).

Tout ça pour faire un tour dans ma Citroën de location, alors que je la rends avec des pneus usés jusqu'à la toile, après une boucle de 3300 kms ! Il faut que je refasse le plein... J'en profite aussi pour acheter en pharmacie quelques boites de médicaments, c'est moins cher que le reste à payer en France, après le remboursement de la Sécu et de la mutuelle !

Pour ma dernière soirée, j'aurais bien voulu déguster une pastilla, sorte de tourte à la viande de pigeon, cette bestiole qui chie partout sur vos pompes, mais on n'en trouve plus, donc je me rabats sur un tajine de poulet au citron... Miam aussi !

Survol des Pyrénées.
Voilà, à un mois près, j'aurais été obligé d'acheter un riad à Marrakech pour passer ma période de confinement, quelque part il y a très longtemps, dans une galaxie lointaine...

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